De manière générale j'imagine le projet le plus accessible possible. Bien sûr ce n'est pas toujours si simple de faire pointu et accessible... Le mieux est de partir des lieux communs les plus répandu : aussi bien les préjugés les plus courants que les connaissances scientifiques de base que tout le monde admet. Par exemple : Si le "seulement 1 pour cent de différence génétique entre l'humain et le chimpanzé" (qui pourtant n'explique pas grand chose) est connu de tout le monde, il n'en reste pas moins que dans l'esprit de touste un chimpanzé est un singe et un humain n'en est absolument pas un (la classification "Singe" ne correspond même pas à une espèce mais à un genre, c'est-à-dire le degré au-dessus). Le chimpanzé aura donc dans notre esprit plus à voir avec le ouistiti, pourtant très différent du point de vue physique, comportemental ou génétique, qu'avec nous. Ça n'a absolument aucun sens de classer le chimpanzé avec le ouistiti si nous refusons de nous classer avec, mais c'est comme ça. On pourrait penser que l'absurdité de cette classification sauterait aux yeux de touste une fois les 1 pour 100 admis, mais rien à faire même avec toutes les données en main nous nous obstinons à voir une frontière infranchissable entre la catégorie singe et nous.
Au-delà de l'absurdité d'un cas particulier c'est toutes les classifications par espèce ou par genre qui ne tiennent plus bien debout. Darwin lui-même avait bien compris que sa théorie de l'évolution mettait sérieusement à mal la notion d'espèce. Il ne pensait pas d'ailleurs que la systématique (recherche de groupements naturels en biologie) des espèces survivrait longtemps à ses découvertes. Dans L'origine des espèces, il écrivait d'ailleurs : «Lorsque les vues exposées dans cet ouvrage (…) seront admises par tout le monde (…) les systématiciens ne seront plus sans cesse hantés par le doute obscur de savoir si telle ou telle forme est, dans son essence, une espèce. Cela j'en suis sûr, et j'en parle par expérience, ne sera pas un mince soulagement.» (Darwin "L'origine des espèces"). Mais malgré tout, contrairement à ce qu'imaginait Darwin et plus d'un siècle après que ses vues soient « admises », les espèces se portent à merveille et les systématiciens se livrent à des bricolages acrobatiques pour perpétuer à tout prix cette notion. (Voir donc "les espèces non plus n'existent pas" de D.Olivier dans "Espèce et éthique - Darwin, un r-évolution à venir".) Bien sûr il y a d'autres enjeux derrière cette question, et pas que de l'ordre des commodités scientifiques.
Les technologies de transgénèse ont aussi prouvé que la prétendue barrière des espèces n'était pas infranchissable. On peut bien sûr, dans un réflexe naturaliste, prétendre qu'en forçant les choses on peut toujours obtenir les pires aberrations, ce qui ne changerait en fait pas grand choses, mais le Projet Génome Humain (HPG) à clairement établi que les humains et donc tous les autres animaux, ont dans leur génome des séquences provenant de rétrovirus qui se sont incorporés dans leur génome au cours de l'évolution — et même en grande quantité. Ce qui fait de nous, en quelque sorte, puisque portant dans notre corps de l'ADN d'organisme non humain, des être transgénique « naturels ».
Gloups ! En allant plus loin on pourrait imaginer ces séquences actives ou même impliquées dans des mutations. En tout cas le concept d'espèce fondé sur la prétendue étanchéité de la fameuse barrière en prend encore un sacré coup. Dans d'autre cas de transfert horizontal de gène la notion de règne aussi n'est plus très étanche.